[Renaliste] dosage iteratif du BNP en hémodialyse
Jean-Philippe Bourdenx
jpbourdenx at me.com
Lun 1 Oct 15:05:12 UTC 2012
Bonjour,
nous utilisons dans le service, depuis 7 ans, le dosage mensuel du BNP avant dialyse ... et il nous semble que c'est un outil extrêmement utile , à condition de bien s'entendre sur sa signification
- on ne doit parler (pour nous) que du dosage du BNP
le NT-BNP est trop amplifié par l'âge et le niveau d'insuffisance rénale
dans notre expérience, il faut diviser par un facteur 10 le taux de NT-BNP pour estimer celui du BNP
il faut donc se battre avec les laboratoires pour obtenir le dosage du bon fragment
doser le marqueur après dialyse peut se justifier mais on introduit alors une variable de plus (l'épuration du peptide) dans le raisonnement : c'est déjà assez compliqué !
- le BNP est un marqueur NON SPECIFIQUE mais très SENSIBLE de contrainte (distension) ventriculaire (essentiellement GAUCHE) :
c'est un peptide de très courte demi-vie (une échocardiographie à 15 jours peut ne pas expliquer le taux mesuré)
il s'élève en situation de contrainte pressionnelle, hypertrophique, valvulaire, fonctionnelle (corrélation inverse avec le degré de dysfonction) et volémique
l'explication est souvent multifactorielle (il ne faut pas vouloir lui faire dire qu'une seule chose !)
il ne s'agit donc pas seulement d'un marqueur d'insuffisance cardiaque même si c'est la baisse de la fraction d'éjection qui le fait monter le plus
ce n'est pas un bon marqueur du coeur droit
un BNP élevé doit être interprété en fonction du contexte cardiovasculaire et des résultats d'une bonne et quasi "synchrone" échocardiographie (dont les conditions de remplissage ventriculaire gauche, les mesures de masse VG, FE, VCI, etc ...)
il peut être parfaitement normal (< 100) chez nos patients dialysés même ayant des antécédents cardiovasculaires : c'est à dire que diverses interventions thérapeutiques peuvent permettre sa normalisation
il est toutefois souvent impossible à normaliser si la cardiopathie est sévère ; il convient alors de raisonner sur les variations du BNP pour comprendre la tendance et fixer le BNP "habituel optimal" du patient
toute variation à la hausse sans contexte clinique cardiologique patent est évocatrice d'une dérive du poids sec et incite à "sécher" le patient avant de voir apparaitre les signes d'intolérance
- il est doué d'une grande valeur prédictive NEGATIVE c'est à dire que, quand il est normal, on peut exclure toute contrainte ventriculaire donc être certain d'être au sec
il permet donc de limiter la fréquence des chutes tensionnelles en adaptant sans crainte la cible pondérale sans examen supplémentaire, ou en évitant les adaptations préventives (parce que le patient mange un peu moins de façon transitoire) inutiles du poids sec
- il reste un facteur de mauvais pronostic (dans notre expérience les valeurs supérieures à 1000... surtout s'il s'avère impossible d'agir sur le niveau du biomarqueur)
- le néphrologue est réellement acteur de la variation du taux de BNP par l'adaptation à la baisse du poids sec, mais aussi par la gestion de la nutrition, des anti-HTA, des médicaments de l'HVG, des valvulopathies etc ...
cf par ex le travail dans NDT de Charles Chazot
il y a beaucoup de choses à faire sur le plan thérapeutique
le coût de l'examen est certain mais la valeur ajoutée indéniable
il nous semble important de doser donc de façon séquentielle ce type de marqueur car plus qu'un niveau donné à un instant t, ce qui est importe est l'impact de mesures thérapeutiques adaptées et la variation (résultante) du niveau du biomarqueur
Pour info, actuellement, la médiane du BNP dans le service est de 350, 1° quartile à 160, 3° quartile à un peu plus de 600
Amicalement
Dr Jean-Philippe Bourdenx
CTMR Saint-Augustin
106 Avenue d'Arès
33000 Bordeaux
jpbourdenx at me.com
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